il Mandonnet

BIBLIOTHEQUE D’HISTOIRE ÉTUDES
P. MANDONNET
DANTE
LE THEOLOGEN
PARIS
DESCLÉE DE BROUWER & CIE
76 bis, RUE DES SAINTS-PERES (VII)
Quelques érudits italiens, persuadés avec raison que Dante a fréquenté les écoles de Santa Maria Novella, se sont interrogés pour savoir quels maitres il aurait pu y rencontrer.
Ils ont nommé Remigio Girolami; un Precheur fiorentin, qui avait recu à l’université de Paris la licence ès arts en 1267 et pris l’habit dominicain avant de rentre enItalie.
Dante a certainement connu Girolami qui était le prédicateur de circonstance dans les événements courants de la vie fiorentine. Il l’a suivi vraisemblablement comme professeur de l’école conventuelle, mais non comme régent du Studium generale, Girolami n’ayant occupé ces fonctions qu’après le départ de Dante pour l’exil.
Par contre, Alighieri a dù entendre celui qui fut le premier ou le second régent de l’étude générale florentine dominicaine. Lors de l’établissement de ce Studium en 1294, ou très peu après, mais bien plus probablement à cette date, le professeur nomméfut Nicolas Brunacci de Pérouse.
Ce jeune religieux était l’étudiant de Thomas d’Aquin à Viterbe, quand le maitre dut partir inopinément au mois de novembre 1268, pour Paris, afin d’y reprendre l’enseignement universitaire.
Thomas emmena avec lui frère Nicolas, qui resta son auditeur jusqu’au retour du maitre en Italie, après le 29 juin 1272.
A ce moment Brunacci fut envoyé au Studium generale de Cologne dont Albert le Grand était le régent. Après quelques années, le jeune religieux rentra dans sa province et, à cette occasion, Albert écrivait au chapitre: « Je vous renvoie frère Nicolas de Pérouse, un autre frère Thomas d’Aquino.
Albert ne fut pas prophète; néanmoins Brunacci devint un religieux éminent dans l’enseignement et l’administration de sa province. Quand après l’établissement du Studium generale de Florence en 1294, on chercha un homme capable de faire face à cette nouvelle situation, le Maitre Général, à qui il appartenait de pourvoir dc maitres ces sortes d’écoles, jeta naturellement les ycux sur un religieux qui venait de passer entre les mains des deux plus grandes autorités. scientifiques de l’époque.
Dante put avoir par Brunacci une vue très claire des deux personnalités qu’étaient Albert et Thomas, et l’on a bien cette impression quand, à la dernière page qu’il ait écrite du Convivio, Dante ne nomme plus Thomas, comme il le pratiquait antérieurement, par cette simple désignation, lorsqu’il invoquait son autorité comme celle des grands auteurs: Thomas est devenu le bon frère Thomas d’Aquin. On dirait qu’il l’a connu au cours de sa vie mortelle.